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29 mars 2011 2 29 /03 /mars /2011 21:53

Se perdre, pour mieux se retrouver

Partir à l'aventure pour se tester

S'affamer, s'assoiffer, s'essouffler, se fatiguer

Se sentir libre et vivant ; s'épuiser sainement.

 

Voici mes impressions après deux heures à rouler, rouler, rouler...

16h. Deisenhofen. Il fait beau, je n'ai pas envie de rentrer directement chez moi, m'enfermer dans un appart en sous-sol. Ca craint. Je récupère mon vélo, j'installe mon sac et mon manteau à l'arrière sur le porte-bagages et je me lance. A bâbord, toute ! Le chemin habituel, c'est à tribord, remonter la Linienstraße. Aujourd'hui donc, nouveauté, esprit aventurier, je change de cap. Direction euuuh je n'ai même pas fait gaffe aux noms des rues. Je longe la voie de S-Bahn direction Holzkirchen, le terminus. Tiens, une route, une piste cyclable, voyons voir. Je roule. A ma droite une forêt, à ma gauche la voie rapide. Mais je n'aime pas rouler près des voies rapides, aussi pratiques soient les pistes cyclables. La forêt, là, elle me fait de l'oeil... Je finis par trouver un sentier praticable. Enthousiaste, je m'y engouffre donc. Forêt à gauche, forêt à droite. Je roule. Des arbres aux troncs immensément hauts. Je me revois gamine, en vacances l'été dans les Landes. Une bifurcation, soudain. Je m'arrête : à droite, ou à gauche. En prenant à droite, j'imagine que cela va me faire revenir vers la voie rapide plus tôt que prévu. Le soleil est très haut, la balade est agréable. Je prends à gauche.

Forêt, forêt, forêt. Ca n'en finit décidément plus. Mais où sont passées les traces de civilisation, m'interroge-je ? Aucune signalisation. Aller tout droit, toujours tout droit. Regarder le soleil, toujours aussi haut. Ca va, je me dis, tant que le soleil est haut, je continue. Après tout, toute entrée possède sa sortie, non ?

Je roule. J'ai un VTT, heureusement. Je ne sais pas comment j'aurais fait sans. Personne, absolument personne. je suis affreusement seule dans cette forêt qui semble ne jamais se finir ! Je m'inquiète légèrement : combien de kilomètres ai-je donc déjà bien pu faire ? Je regarde mon portable : oh, presque 17h déjà, que l'heure est donc passée vite ! Mais il me faut continuer, c'est toujours tout droit, c'est très simple en vérité mais sans indication, on perd facilement ses repères ! Je me demande bien où je vais atterir !  Me suis-je beaucoup éloignée de Deisenhofen ? Mais je me rassure. Il fait encore jour, et ne dit-on pas que "tous les chemins mènent à Rome" ?

Ouf, j'en vois enfin un bout ! Pas trop tôt. Un couple de cyclistes arrive en sens inverse. Je m'arrête, les interpelle.

 

- Grüß Gott ! Entschuldigung, wissen Sie, wo wir sind ?

- Oui bien sûr, le village par là en haut, c'est Kreuzpullach ! (NB. Je sais ce que je dis, je comprends ce qu'on me dit, mais retranscrire leurs propos mot pour mot en allemand, c'est une toute autre affaire que je ne tenterai pas ici.)

- Kreuzpullach ? Aber das kenne ich nicht ! (*ce nom de bled paumé m'est inconnu.*)

- Woher kommen Sie denn ? / D'où venez-vous ? (NB. Ca, j'admets que c'était facile à retranscrire.)

- Aus Deisenhofen. Und ich möchte jetzt dorthin zurück. Ich wusste nicht... dass das Forst so groß war...

- Ok, mais alors c'est par là !

- Aber ich komme schon aus diesem Weg... (J'arrive déjà de ce chemin... *pense : et j'ai pas envie de me retaper toute cette route en forêt en sens inverse...*)

- *blablabla sur les chemins, me montre bien gentiment avec des signes de mains* Allez en haut à Kreuzpullach et là vous trouverez un autre chemin pour repartir.

- Dankeschön ! Guten Nachmittag !

- Versuch's mal ! Tchüss ! ( Cette dernière phrase, je l'ai plutôt compris dans le sens "Il faut l'essayer/le faire au moins une fois,  venir dans cette forêt !". Donc c'est positif ! Je l'ai fait ! o/ )

 

Rejoindre Kreuzpullach, techniquement, ce n'était pas facile et même la partie la plus dangereuse de mon périple. La seule route qui y mène est automobile. Et puis ça monte. Ca monte même très raide et je dois mettre pied à terre. Avec peine, je pousse mon vélo. La route est en virage, pourvu que les voitures fassent attention, je me dis, anxieuse. Ca serait tout de même bête de mourir fauchée par une voiture alors que précédemment, on s'imaginait être le Petit Chaperon Rouge du conte de Perrault, soucieux de retrouver le chemin vers sa maison avant que la nuit ne tombe.

J'arrive enfin à Kreuzpullach. J'avais raison, c'est un coin perdu. A l'entrée du village, un bâtiment indiquant un garage pour motos. Deux hommes devant. (Peut-être Renaud et son pote Manu, avant qu'il n'aille noyer son chagrin d'amour au bar, imaginons qu'en plus, sa bécane avait rendu l'âme...Manu, rentre chez toi, tu vas pas t'tailler les veines...) Les deux seuls habitants que j'aurais vus. Un arrêt de bus plutôt ridicule aussi. Un panneau indiquant la direction "Oberhaching" : Alleluia ! J'aurais passé à peine 3 min dans ce kleines Dorf, je dévale pleine d'ivresse cette route qui descend sensiblement. Un soleil qui réchauffe, le vent qui rafraîchit durant la descente. Parfait. Toujours des voitures, pas de pistes cyclables. Je roule, soulagée d'avoir de nouveau des repères. Et puis j'arrive sur... la voie rapide de tout à l'heure. De nouveau la piste cyclable. Chemin en sens inverse. Je repasse même devant l'entrée du sentier qui m'avait amenée dans cette forêt. "Cette fois, tu ne m'auras pas !"

Je roule, je roule, je roule. Je retrouve la Via Maria et la voie de S-Bahn. En un clin d'oeil, ou presque, je suis à 100 m de la gare. Mais le soleil est encore haut et à présent que je suis en territoire connu, je veux repartir à l'aventure. Ou découverte de ma ville, c'est la même chose. Je bifurque donc à gauche. Jagdstraße, si je me souviens bien. Je remonte la rue jusqu'à son extrêmité. Umleitung, aucun souci, je continue plus loin. Plus loin, ce n'est plus possible. J'emprunte donc un sentier de campagne qui traverse tout. Je me repère avec l'Evangelische Kirche, cette grande tour blanche dans le paysage. Un couple de vieux Bavarois sur le sentier. Je ralentis, évite la Oma. Elle était de dos, transquillement à marcher quelques mètres derrière son époux, elle ne m'avait pas entendu arriver. De surprise, elle pousse une sorte de juron. Je n'ai pas compris, mais ça sonnait assez religieux, et puis bon, les petits vieux ici sont adorables (Ein freundlichen Völkchen sind Sie !), ça me fait donc rire !

Je repasse à travers la forêt. L'Evangelische Kirche était encore visible, derrière moi, à ce moment-là. Malheureusement, la forêt dissimule vite les alentours. Je roule encore. J'arrive à une route, avec un croisement. Bon, encore un dilemme : à gauche ou à droite ? J'ai l'impression de reconnaitre la route, sans certitude, et j'avais dû l'emprunter mais dans l'autre sens, juste une fois. Je vais une nouvelle fois à gauche, je crois prendre la bonne décision mais plus tard, je me dirais qu'il aurait fallu prendre à droite... Je continue de rouler, encore et encore. Je commence à avoir sérieusement faim, j'avais à peine englouti un Leberkässemmel à 13h. Un coup, je pense reconnaître, un autre coup, je me sens de nouveau perdu. C'est mi-forêt, mi-campagne. Je ne vois plus l'Evangelische Kirche. Trop loin. Et puis quelques maisons. Je ne sais pas le nom de ce coin-là, je l'ai su, j'ai oublié. Mais à présent, je sais de nouveau où je suis. Essouflée, je m'arrête deux minutes. Encore des cyclistes, qui, eux, passent en trombe sans se soucier. Je reprends ma route de campagne et retrouve enfin le chemin que j'avais pensé trouver il y a 10/15 min déjà, lorsque j'avais décidé à tort de prendre à gauche au lieu d'à droite : c'est une des nombreuses entrées dans la forêt mais je sais qu'en passant par là, pour avoir emprunté ce chemin la semaine dernière après avoir pris en photo le panneau de danger "Krötewanderung", j'atterirai sur l'Alte Oberbibergerstraße. Finalement, et pour la dernière fois ce jour, je m'aventure en territoires connus. Plus aucune halte avant d'être devant chez moi.

18h. Je suis crevée. J'ai faim, j'ai soif, je me presse de rentrer au terrier. Je suis quand même largement satisfaite de moi. Pour une non-sportive, rouler autant, c'est rare ! ^^ Deux heures de parcours à vélo. Estimation : une vingtaine de kilomètres. Impossible d'être précis. Je regrette, j'aurais dû acquérir un compteur pour mon vélo, ça aurait fort été utile !  Ca aurait peut-être même pu afficher le nombre de calories cramées !  xD Malgré cette tenace "bonne résolution" depuis des années, et malgré la Bavière et sa délicieuse charcuterie, c'est pas encore maintenant que je prendrais du poids. Direct, je me précipite sur mon frigo pour soulager ce corps en carence de glucose.

"IL ME FAUT DU SUCRE ! DU SUUUUUUUUCRE !" - "P'tit Vittel : Y a qu'ta mère pour croire qu'c'est de l'eau !"


Ca et mon fauteuil. Perfecto, je ne bouge plus moi. Je suis achevée ! Mais put*** que ça m'a fait du bien ! Je recommencerai bien même. Mais pas tout de suite. Demain, normalement, c'est le Nymphenburgpark. Mais à pied. Ca promet aussi. ;)

 

 

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Présentation

  • : Journal d'une Germanophile
  • : Jeune Française partie à 20 ans travailler en Allemagne comme Fremdsprachassistentin en Bavière, j'étudie depuis l'allemand et plus encore l'interculturalité franco-allemande à Aix-en-Provence, Berlin et Tübingen. Ce blog survit pour faire partager mes coups de coeur, de gueule parfois, mon quotidien surtout, mes voyages, mes espoirs et mes doutes...
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